Le géant britannique des hydrocarbures BP a annoncé lundi dans un communiqué réduire « de manière significative » ses investissements dans les énergies renouvelables « pour le reste de la décennie ». Une demi-surprise étant donné que le groupe, sous la pression de certains actionnaires désireux de doper ses bénéfices, était incité à se recentrer sur les hydrocarbures.
Le géant britannique des hydrocarbures BP va réduire « de manière significative » ses investissements dans les énergies renouvelables : comme son compatriote Shell la semaine dernière, il confirme son rétropédalage sur la transition énergétique, pour doper sa rentabilité.
Avec ce recul, annoncé dans le cadre de la création d’une co-entreprise avec l’énergéticien Jera fusionnant leurs activités dans l’éolien en mer, le groupe BP poursuit un changement de stratégie radical, lui qui s’était distingué à partir de 2020 par un ambitieux plan de neutralité carbone.
Il ne s’agit cependant que d’une demi-surprise : BP avait commencé à freiner ses ambitions l’an dernier, espérant doper un cours en Bourse à la traîne par rapport aux autres majors pétrolières, notamment américaines.
Les investisseurs spéculent depuis des mois sur une nouvelle marche arrière de BP sur ses objectifs de réduction de pétrole et de gaz. L’entreprise n’a encore rien confirmé mais pourrait le faire lors de la publication de ses résultats annuels en février.
« L’accent mis par BP sur les énergies renouvelables et la réduction des hydrocarbures » sous le mandat du précédent directeur général Bernard Looney « n’a pas remporté l’adhésion des actionnaires », résume Russ Mould, analyste chez AJ Bell, interrogé par l’AFP.
Le patron actuel, Murray Auchinloss, « cherche des moyens pour augmenter le rendement des actionnaires » avec des projets où les dépenses « peuvent être soigneusement contrôlées » et les retours sur investissement sont élevés, ce qui n’est pas le cas de l’éolien offshore, selon l’analyste.
Ambitions « irrationnelles »
BP avait commencé à rétropédaler sur ses objectifs en février 2023, au grand dam des militants écologistes, annonçant une diminution moins rapide que prévue de sa production de pétrole et de gaz : – 25 % en 2030 par rapport à 2019, contre un objectif de – 40 % précédemment.
Encore trop pour certains actionnaires, comme le fonds activiste Bluebell, qui appelle depuis plus d’un an BP à revoir encore à la baisse des ambitions jugées « irrationnelles » sur les énergies propres.
Son concurrent britannique Shell a lui aussi fait machine arrière ces derniers mois sur certains objectifs climatiques, pour se recentrer sur les hydrocarbures et doper ses bénéfices. Il a encore annoncé la semaine dernière qu’il ne développerait plus de nouveaux projets d’éoliennes en mer.
Les géants britanniques ne sont pas seuls à remettre l’accent sur les énergies fossiles: le français TotalEnergies avait indiqué en octobre qu’il comptait encore augmenter sa production de pétrole et de gaz jusqu’en 2030.
De l’autre côté de l’Atlantique, le géant américain de l’énergie ExxonMobil a, quant à lui, affirmé en août qu’il prévoyait une demande de pétrole quasiment inchangée en 2050 par rapport aux niveaux actuels.
Les investisseurs applaudissent
La nouvelle coentreprise annoncée lundi par BP, nommée Jera Nex BP, sera basée à Londres et devrait être opérationnelle au troisième trimestre 2025.
BP et Jera ont précisé lundi qu’ils investiraient 5,8 milliards de dollars au maximum avant la fin de 2030, puis la coentreprise se financera seule.
La part du britannique dans ces dépenses sera de 3,25 milliards de dollars. C’est nettement moins que ce que le groupe avait laissé entrevoir au marché, BP devant initialement consacrer à l’éolien offshore environ un tiers des quelques 30 milliards prévus dans les renouvelables entre 2023 et 2030.
Sur la Bourse de Londres, les investisseurs applaudissent: vers 14 H 30 GMT, le titre de BP grimpe de plus de 3,5 %.
Jera, créée en 2015, est la plus grande compagnie d’électricité du Japon, coentreprise entre Tokyo Electric Power (Tepco) et Chubu Electric Power.
Elle avait notamment acquis l’an dernier auprès du géant belge de la distribution Colruyt sa filiale de parcs éoliens Parkwind pour quelque 1,55 milliard d’euros.
Avec AFP